La Renault 5 est un phénomène ! Après avoir redéfini le concept de voiture urbaine, mi-citadine, mi-utilitaire, elle a donné naissance à une gamme complète avant de devenir un modèle dont tous les constructeurs se sont inspirés. Dans ce dossier d’un genre nouveau, nous allons, au travers de l’essai de l’une de ses versions les plus rares, revenir sur l’histoire de cette auto qui sera, dans les années à venir, l’une des stars de la collection
Alors que la R12 Gordini tire sa révérence, la Régie nationale choisit de promouvoir sa petite R5 sur la scène sportive. Le premier opus se nomme LS, et il marque le début d’une extraordinaire lignée. Voici celle par qui tout a commencé…
Equipée du moteur de la R12 TS, la LS offre une conduite dynamique sans être radicale. Nous l’avons choisie pour illustrer ce dossier consacré à l’histoire de la Renault 5.
C’était le bon temps des pattes d’eph’, des cheveux longs et des caddies en vrac sur les parkings d’Euromarché. Sur les routes, les années 70 ont vu fleurir une tripotée de petits bolides bardés de peintures de guerre. Elles ont également inauguré les limitations de vitesses, souffert des crises pétrolières et ont vu ressur gir les menaces sur la pratique du sport automobile. Fille des seventies, la Renault 5 et ses teintes acidulées s’est présentée comme l’héritière spirituelle de la 4 CV. En se faisant appeler Supercar, elle incarne une nouvelle forme de mobilité, pratique, conviviale, ludique.
Pour la première fois, une voiture personnifie l’automobile ! Portée par une habile campagne de communication, la Renault 5 connaît un début de carrière tonitruant. Mais prise dans le tourbillon du succès, elle va rapidement manquer d’une gamme plus étoffée qui comprendrait un peu plus que les deux versions au catalogue : la basique L et une TL plus performante et mieux finie. En concentrant les troisquarts des ventes, cette dernière a clairement indiqué la direction à prendre dans l’hypothèse d’un élargissement de l’offre : plus de puissance et de prestations.
C’est ainsi qu’a mûri l’idée d’une troisième version typée grande routière à l’image dynamique et dotée d’un confort accru. Les jeunes automobilistes plutôt à l’aise financièrement et essentiellement urbains constituent le cœur de cible du futur modèle baptisé LS. Des personnes qui n’ont pas encore fondé une famille et qui veulent se faire plaisir avec une petite voiture ambitieuse. Car la LS n’est pas présentée comme une sportive, mais plutôt comme une routière compacte.
Vive et alerte, la r5 Ls a presque tout d’une grande dans la circulation
Elaborée sur une base de TL, elle est animée par le moteur de la R12 TS, un 4 cylindres culbuté de 1 289 cm3 dont la puissance est ici augmentée. Si la performance pure n’est pas recherchée, polyvalence et fiabilité sont au cœur du programme. Donnée pour 155 km/h, l’auto est chronométrée par les essayeurs à 147 km/h sur l’anneau de Montlhéry, ce qui donne, une fois le coefficient de correction appliqué, un bon 151 km/h. Les accélérations relevées sont en moyenne de 36,3 secondes aux 1 000 mètres départ arrêté. Vive et alerte, la R5 LS a presque tout d’une grande dans la circulation. Au feu vert, elle détale comme un lièvre, alors que sur les nationales, elle joue des coudes avec plus grosses qu’elle.
La LS est une bourgeoise discrète. A part les jantes larges à six trous et les autocollants optionnels, pas grand-chose ne permet de la distinguer d’une R5 ordinaire.
Mécaniquement, ce modèle se distingue également par sa transmission spécifique. Issue de la TL, sa boîte 4 bénéficie de rapports de 2e et de 3e modifiés ainsi que d’un couple court destiné à renforcer la nervosité. Le freinage mixte est également adapté aux performances puisqu’il comporte un double circuit et un dispositif d’assistance. Question châssis, l’avant reçoit une barre stabilisatrice majorée alors que l’arrière s’équipe d’un stabilisateur, contrairement aux L et TL. Enfin, les phares à iode accueillent un deuxième faisceau alimentant des longues portées intégrées.
L’équipement comprend un essuie-glace arrière et une lunette dégivrante, des jantes stylées, un compte-tours et de la moquette à l’avant. En revanche, les glaces teintées n’apparaissent que sur la liste des options, de même que les stickers décoratifs, il est vrai peu discrets et donc pas forcément du goût de tout le monde. Enfin, la LS inaugure une nouvelle planche de bord au revêtement appelé “grain lunaire”. Panoplie d’autocollants mise à part, cette petite voiture reste sobre et de bon ton.
Elle passe volontiers pour une R5 ordinaire, mais qui roule tout de même au Super. Présentée à la presse et en couverture des catalogues dans une teinte bleue métallique dont elle a l’exclusivité, la LS suggère la sportivité, mais avec retenue. En mettant l’accent sur le confort et l’équipement, elle joue aussi les petitesbourgeoises.
En 1974, acheter une R5 LS était tout simple. Il suffisait de se rendre chez son agent Renault, puis de signer un chèque de 19 200 F hors options… si on en avait les moyens. Cette auto était assez chère, mais elle a connu un petit succès puisqu’il s’en est vendu plus de 30 000 exemplaires au terme du premier exercice.
Christian Muratet et sa Renault 5 LS 1975
“La première prépa de mon père”
Cette auto est une sorte d’hommage, aux yeux de Christian. Un hommage à son père Maurice, présent ici à ses côtés, qui lui a transmis l’amour des moteurs et de la mécanique de compétition. « Mon père a fait plus de 1 000 moteurs dans sa carrière. Il a également préparé de nombreuses autos pour différentes disciplines du sport automobile. L’une de ses spécialités fut les courses monotypes Renault en circuits, et c’est grâce à la R5 LS qu’il a mis le doigt dans l’engrenage.
En effet, cette auto fut la première qu’il prépara, en 1976, au bénéfice d’un client de Montauban. Je me souviens qu’elle était jaune soleil. En 2013, je me suis donc mis en tête de reconstruire une LS Coupe depuis une vraie caisse de LS et à partir de pièces authentiques. Les R5 LS sont très difficiles à trouver, il y en a peu sur le marché. Lorsque je suis tombé sur l’annonce qui proposait cet exemplaire marron, j’ai foncé illico à Limoges.
Elle appartenait à un agriculteur nommé Maurice Villeneuve, une personne qui l’avait achetée, d’occasion, en 1976. Lorsque j’ai vu l’auto, plus très fraîche en carrosserie mais rigoureusement complète et conforme, je me suis soudain dit qu’il serait dommage de la transformer en version Coupe. Je l’ai donc acquise, puis j’ai entrepris sa restauration intégrale depuis la caisse nue. Les sièges étaient abîmés, mais par miracle, j’ai pu dénicher un rouleau de tissu neuf d’origine. Quelle chance d’avoir pu refaire les sièges à l’identique !
Passeport technique Renault 5 LS
MOTEUR
4 cylindres en ligne longitudinal AV. Bloc fonte et culasse alu, un arbre à cames latéral entraîné par chaîne, deux soupapes par cylindre, rappel par ressorts hélicoïdaux. Vilebrequin en fonte renforcé supporté par cinq paliers, antifriction par coussinets, graissage sous pression par pompe mécanique à engrenages ■ Cylindrée : 1 289 cm3 ■ Alésage x course : 73 x 77 mm ■ Puissance maxi : 64 ch DIN à 6 000 tr/mn ■ Couple maxi : 9,6 mkg DIN à 3 500 tr/mn ■ Rapport volumétrique : 9,5:1 ■ Alimentation : un carburateur double corps Weber 32 DIR, pompe à essence mécanique ■ Allumage : par batterie 12 V 40 Ah, bobine et distributeur, alternateur ■ Refroidissement : liquide.
TRANSMISSION
Traction-avant ■ Embrayage : monodisque à sec, commandé par câble ■ Boîte de vitesses : 4 rapports synchronisés + MAR (type 354), levier au plancher ■ Rapports de boîte : 1re : 3,67 – 2e : 2,37 – 3e : 1,52 – 4e : 1,03 – MAR : 3,23 ■ Rapport de pont : 8 x 29.
STRUCTURE
Coach 5 places, coque autoportante en tôles d’acier ■ Suspension AV : roues indépendantes par bras inférieurs oscillants, barres de torsion longitudinales, barre stabilisatrice 16 mm et amortisseurs télescopiques ■ Suspension AR : roues indépendantes par bras tirés, barres de torsion transversales, barre stabilisatrice de 14 mm et amortisseurs télescopiques ■ Jantes : en tôle 4,5 B 13 ■ Pneus : 145 SR 13 à arceaux
droits ■ Freins : disques AV/tambours AR, double circuit et assistance par Mastervac ■ Frein à main : mécanique sur les roues AR ■ Direction : à crémaillère ■ Rayon de braquage : 4,90 m ■ Dimensions (L x l x h) : 3,50 x 1,52 x 1,40 m ■ Empattement : 2,40 m ■ Voies AV/AR : 1,29/1,24 m ■ Poids : 770 kg (à vide).
PERFORMANCES
Vitesse maxi : 155 km/h ■ 1 000 m DA : 36’’3.
PRODUCTION
Février 1974 à mars 1975 : la production totale des types R1224 (LS et TS confondues) s’élève à 409 859 exemplaires jusqu’en décembre 1983. Si les deux modèles ne sont pas différentiés dans les registres, nous savons toutefois qu’il y a eu 30 043 LS en 1974, puis 63 295 LS et TS en 1975 (source L’Argus) ■ Prix en 1974 : 19 200 F ■ Type Mines : R1224 ■ Options : garnissage simili, toit ouvrant, peinture métallisée, vitres teintées et pare-brise feuilleté, griffes LS AV et filets décoratifs ■ Nuancier : blanc 355, bleu clair 410, jaune citron 301, rouge 733, orange 311, beige métal 113, vert Bornéo métal 906, bleu métallique 457, bleu foncé 460 ■ Puissance fiscale : 7 CV.
COTATION
Devenues très rares et aussi recherchées que les premières R5 Alpine, les LS sont extrêmement convoitées et ne passent jamais une heure lorsqu’elles sont publiées dans les petites annonces. De fait, une très belle LS peut désormais se monnayer aux alentours des 8 000 euros.
Devenir propriétaire d’une LS en 2018 est une autre paire de manches… En effet, ces petites merveilles ont quasiment toutes disparu de la surface de la planète. Et les rares survivantes sont souvent dans de tristes états. Je vous prie de croire que lorsque je me suis retrouvé face à l’exemplaire en photo sur ces pages, une auto authentique et rigoureusement conforme, je n’ai pas tourné dix fois autour du pot.
Il me fallait trouver son propriétaire et le convaincre de nous confier sa perle rare ! Ce devait être mon jour de chance. Non seulement Maurice et Christian Muratet, moto son ristes de père en fils, ont accepté de bonne grâce, mais ils m’ont aussi proposé de vous présenter leur TS en configuration Coupe. Pincez-moi, je rêve ! Nous voici donc rendus en région toulousaine, sous le premier cagnard de ce début d’été. Sans faire de chichis, le père et le fils me suggèrent illico de conduire la LS jusqu’aux vestiges du circuit de Cadours Laréole, à trois-quarts d’heure de là.
Certes, les abords de cet ancien tracé non permanent fleurent aujourd’hui davantage le glyphosate que l’huile de ricin calcinée, mais je parie que nos deux R5 vont y retrouver leurs instincts premiers. Chemin faisant, j’observe, je manipule, j’apprécie. Bref, je fais mon boulot, instinctivement. Sous mes yeux ébahis figure le premier tableau de bord sportif ayant équipé une Renault 5.
Il comporte un compte-tours central et un compteur gradué jusqu’à 180. Posé juste devant, le volant à deux branches ne m’évoque rien de connu. Normal, il est spécifique à cette version. Allez dénicher ça aujourd’hui… Evidemment, le levier de vitesse ne se situe pas au tableau de bord mais au plancher, alors que le revêtement de la planche de bord, fort sympathique à l’œil, proscrit tout reflet gênant. La sellerie mixte simili et
son moteur offre à la Ls des performances dignes d’une berline de gamme supérieure
tissu peau de pêche est cossue, les contre-portes sont matelassées, il y a deux cendriers à l’arrière. Bref, l’ensemble est assez flatteur. Après plusieurs minutes de roulage, mes impressions de conduite s’affinent. Le moteur répond avec une promptitude permettant d’oser des dépassements strictement impossibles avec une TL. Je ne parlerai même pas de la modeste L et de son bloc issu de la Dauphine… A défaut d’avoir un caractère sportif, la mécanique est donc suffisamment puissante pour procurer à cette petite auto des performances dignes d’une berline de gamme supérieure.
Comme dit précédemment, la boîte bénéficie d’un étagement qui avantage les accélérations, tout en favorisant la vitesse et les consommations du fait de la 4e non raccourcie. En contrepartie, un trou est perceptible entre la “trois” et la “quatre”. Ce qui me dérange, c’est la qualité de la sélection, et en particulier l’engagement de la troisième vitesse assez peu intuitif. Je ne saurais vous dire si ce défaut vient du dessin de la grille ou bien d’un guidage peu efficace. Peut-être un peu des deux…
Le comportement routier est bien amélioré par rapport aux R5 L et TL, principalement grâce au montage d’une barre stabilisatrice arrière, même si nous avons perdu l’habitude des tractions qui prennent un roulis exagéré. Sans doute encore souple en suspensions, la LS est ainsi pénalisée par des mouvements de caisse prononcés. Ceux-ci ont tout de même une vertu : celle d’inciter à conduire proprement et à soigner ses trajectoires afin de minimiser les transferts de charge.
La conduite de la version Coupe m’apportera, dans un deuxième temps, la preuve des prédispositions sportives de cette petite auto : une fois équipée de suspensions appropriées et de pneus à gommes tendres, la LS (ou TS dans le cas présent) peut être menée énergiquement sans avoir le sentiment de combattre en permanence les effets de l’inertie. En prime, la démultiplication est raccourcie par les pneus à table basse, la direction est nettement plus directe et les 80 ch du bloc lui octroient une bienveillante nervosité.
Cerise sur le gâteau : l’arbre à cames “croisé” offre au moteur le ralenti boiteux caractéristique des voitures de course. Car c’en est une, une vraie ! S’il est clair que la R5 LS aurait gagné à être munie de disques de freins à l’arrière, son système mixte à double circuit couplé à une assistance procure un ralentissement net, suffisant sur route mais encore juste en compétition. Heureusement, le choix des plaquettes était laissé à la discrétion des concurrents, alors que le montage d’une paire de boas de refroidissement permettait d’augmenter l’endurance des freins avant.
De ce point de vue, on touche du doigt les limites d’une préparation économique destinée à obtenir une auto de course bon marché. Mais la R5 LS, c’était avant tout un premier pas dans la compétition et dans l’univers des petites grandes routières. De ce double point de vue, on peut dire qu’elle est sensationnelle !
Dotée de surfaces lisses et de formes douces et nerveuses à la fois, la Renault 5, uniquement disponible en trois portes jusqu’à l’été 1979, est une belle réussite esthétique. Notez l’ensemble lave-glace et dégivrage arrière monté en série sur la LS.
DU PROJET 122 A LA RENAULT 5
Cette étude à la gouache de Michel Boué date de 1967. On est encore loin du dessin définitif, mais quelques traits sont déjà là, à commencer par les feux AR et les boucliers.
Nous sommes en 1967 et Pierre Dreyfus, le patron de la Régie nationale, approuve le projet d’un petit véhicule d’un genre nouveau. Il doit s’agir d’une voiture compacte, plutôt citadine, pratique sans être utilitaire et techniquement proche des Renault 4 et 6 afin de limiter les coûts. Une voiture “branchée”, séductrice, à deux portes et hayon arrière, novatrice dans la forme et dans l’esprit. Il s’agit de satisfaire une clientèle féminine, jeune, qui va de l’avant. Pour beaucoup, ce sera la première deuxième voiture, celle qui doit accompagner l’ascension sociale tout en s’immisçant dans la vie de famille.
Si l’idée d’un véhicule à trois portes n’a pas emporté l’adhésion de tous, à commencer par les vendeurs de la marque, l’histoire a prouvé à maintes reprises que cette configuration n’était pas un frein au succès. La Cox en est le meilleur exemple. Comme pour appuyer ce parti pris, la version à cinq portes ne sera mise sur le marché qu’en 1979, soit sept ans après la sortie du modèle. Le designer Michel Boué esquisse une auto souriante, aux formes douces et sympas. Une voiture qui, comme les R15 et 17, délaissera les lames de pare-chocs au profit de boucliers en matière synthétique s’harmonisant avec la ligne.
Ces derniers seront fabriqués dans une unité nouvelle construite spécialement à Dreux, dans l’Eure-et-Loir. Le véhicule sera peint dans des teintes vives tout à fait dans la tendance de cette fin janvier 1972, période durant laquelle est officiellement présentée cette auto aussi surprenante que ne le fut, 25 ans auparavant, la 4 CV. Pour cause de décès prématuré, Michel Boué n’aura hélas pas la chance de voir sa création prendre la route.
Lancée hors Salon après de nombreux tests sur les pistes d’essai de Lardy, la R5 est proposée en deux versions distinctes : la L de 4 CV dont le moteur trois paliers de 782 cm3 provient de la Renault 4, et la TL équipée du 4 cylindres Sierra 956 cm3 dérivé de la R8. Hormis sa structure monocoque et ses amortisseurs arrière verticaux qui rappellent la R16, la R5 se rapproche techniquement des R4 et R6 avec sa suspension par barres de torsion avant et arrière, sa boîte de vitesses en porte-à-faux avant et son levier de changement de vitesse au tableau de bord.
Curieusement, alors que la R8 fait valoir quatre freins à disque depuis belle lurette, la R5 se contente de disques avant sur la TL, alors que la version L n’a droit qu’à de simples tambours sur les quatre roues. Décrite par la presse comme une voiture « sympa et marrante », la Renault 5 met immédiatement en avant son côté pratique et utile. Vive, astucieuse, gaie et à l’aise dans les manœuvres, elle est totalement en phase avec les besoins et les modes de l’époque.
Elle s’impose d’ailleurs dès la première année comme l’un des best- sellers de la construction automobile européenne, avec des cadences atteignant rapidement les 1 200 exemplaires par jour. Le triomphe est retentissant, 126 300 exemplaires étant produits au terme de l’année 1972. En 1973, la petite Renault doublera quasiment cette performance ! On ne le sait pas encore, mais la Renault 5, qui mérite amplement son petit nom de Supercar, sera la locomotive d’un empire créé en 1898 par cet audacieux jeune homme nommé Louis Renault. Plusieurs décennies plus tard, son entreprise deviendra le premier groupe industriel français, le principal producteur mondial de voitures à traction avant et le troisième constructeur automobile européen.
Janvier 1972, la gamme Renault 5 est dévoilée. C’est le début d’une longue histoire.
LE LOGO INTERDIT
En 1971, la Régie nationale inaugure son nouveau logotype, non pas en grande pompe, mais en l’apposant sur ses nouveaux modèles : R15, R17, puis R5. Nettement plus imposant que la précédente “pointe de diamant” de 1959, elle-même une évolution du losange apparu en 1925 sur le capot des luxueuses 40 CV, ce losange aplati au style épuré ne fera pas long feu à cause de l’action en justice intentée par le fournisseur de produits chimiques Kent.
Ce dernier estimant la nouvelle identité de Renault calquée sur son sigle, il obtient gain de cause, obligeant ainsi le constructeur automobile à modifier son logo, mais aussi à… retirer les emblêmes apparaissant sur les voitures déjà vendues. Dans l’urgence, Pierre Dreyfus propose au peintre Victor Vasarely de réaliser un nouveau logotype présenté en 1972.
Dès lors, le rappel des véhicules a pu être mis en place et les propriétaires qui le désiraient, ou bien ceux ayant emmené leur auto pour une simple révision, sont repartis avec un sigle de calandre inédit, un centre de volant modifié et un cache autoradio tout neuf. Heureusement pour les collectionneurs que nous sommes, de nombreuses R5 de début de production sont passées entre les mailles du filet, et le fameux “logo interdit”, appelé aussi “logo Kent”, se retrouve encore de temps en temps sur une Renault de 1971 ou 1972. De fait, ces autos sont de sacrés collectors.
LES GrANDES DATES
En quinze ans de carrière, la Renault 5 n’a eu de cesse d’évoluer pour s’adapter à son époque et, ainsi, rester dans le coup. Nous vous proposons donc les petits détails et grosses avancées de l’histoire d’un modèle pas comme les autres.
OCTOBRE 1971
Production des premiers exemplaires L (4 CV, 782 cm3, 33,5 ch DIN) et TL (5 CV, 956 cm3, 44 ch DIN, freins à disques et jantes ajourées, baguettes de bas de caisse, banquette AR rabattable).
28 JANVIER 1972
Présentation du modèle et prise des premières commandes.
1973
TL : levier de vitesse au plancher disponible en option (140 F).
FÉVRIER 1974
Fabrication des premières versions LS, kit de transformation disponible pour la Coupe sur circuits.
SEPTEMBRE 1974
L’TL : aérateurs aux extrémités de la planche de bord. TL : lunette AR chauffante et rétro jour/nuit de série.
MARS 1975
Présentation de la R5 TS destinée à remplacer la LS (même moteur 7 CV, 1 289 cm3, 64 ch DIN, feux de
recul, ceintures AV à enrouleurs, appuis-tête incorporés aux dossiers des sièges AV, levier de vitesse gainé, petite console centrale, moquette de plancher).
SEPTEMBRE 1975
L : dynamo remplacée par un alternateur. Apparition de la R5 Société (mécanique TL, panneaux de custode tôlés, pas de banquette AR).
OCTOBRE 1975
Tous modèles : réservoir d’essence muni d’un système antirefoulement.
FÉVRIER 1976
Apparition de la R5 GTL (moteur dérivé de la TS, 7 CV, 1 289 cm3, 44 ch DIN, protections latérales en plastique. Jantes, feux de recul, tableau de bord, volant, console centrale, moquette et levier de vitesse idem TS).
MARS 1976
Présentation de la R5 Alpine (moteur 8 CV, 1 397 cm3, culasse hémisphérique, 93 ch DIN, boîte 5, bouclier AV avec
déflecteur, phares antibrouillard, filets décoratifs sur carrosserie, essuie-glace AR, sièges AV avec appui-tête intégré, nouveau tableau de bord et volant trois branches de type sport, jantes tôle style R12 Gordini).
JUILLET 1976
L, TL, Société : ceintures AV à enrouleurs. L : nouveau moteur 5 CV 845 cm3, 36 ch DIN (en remplacement du 782 cm3 4 CV), levier de vitesse au plancher. GTL : moteur 42 ch au lieu de 44 ch. TS : glaces de custodes ouvrantes, bacaccoudoir dans les portes. Alpine : glaces de custode ouvrantes.
MARS 1977
Société : choix possible entre panneaux AR tôlés ou vitrés.
JUILLET 1977
Rétro extérieur noir mat. L : lunette AR chauffante, disparition du monogramme. TL : sortie d’échappement AR au lieu de latérale, prise diagnostic. GTL : assistance de freinage, glaces de custode ouvrantes, console autoradio, prise diagnostic. TS, Alpine : console autoradio, prise diagnostic. Société : deux moteurs au choix (845 cm3 ou 956 cm3).
FÉVRIER 1978
Apparition de la R5 Automatic (moteur 7 CV, 1 289 cm3, 55 ch DIN, transmission automatique trois rapports à commande électronique, toit vinyle, sièges avec appui-tête, pare-chocs et protections latérales noirs, roues de style, console radio, accoudoirs de portes AV formant vide-poche).
AVRIL 1978
Série limitée R5 Monte-Carlo (moteur TS, peinture rouge et jaune à toit noir, boucliers Alpine, déco de caisse, rétro Californian).
JUILLET 1978
Suppression de la R5 Monte-Carlo. Tous modèles : ceintures AR (sauf Société), feux AV bicolores, totalisateur à six chiffres. TL : nouvelles roues, suppression des enjoliveurs. GTL : puissance fiscale 5 CV au lieu de 7, lave-glace électrique, sièges AV à appui-tête intégré. Automatic : lave-glace électrique. Alpine : montre digitale. Société : nouvelles roues sans enjoliveurs.
NOVEMBRE 1978
Série limitée Le Car (moteur TS, boucliers noirs, roues alliage, antenne de toit style téléphone, montre digitale, fermeture centralisée des portes, essuie-glace AR, catadioptres latéraux, protection plastique des boutons de portes, double baguette chromée sur calandre, inscriptions Le Car sur capot et flancs et Le Car by Renault sur hayon ; teintes gris argent, gris Elysée ou rouge)
JUILLET 1979
Nouvelle carrosserie quatre portes disponible sur finitions Base, TL et GTL. Base, TL, GTL : nouvelles commandes et planche de bord, volant à branche horizontale, dossier de banquette AR rehaussé, nouveau rétro extérieur. Sur deux portes uniquement : panneaux intérieurs avec deux vide-poches et cendrier côté droit. Société : moteur 956 cm3 remplacé par un 6 CV, 1 108 cm3, 45 ch DIN.
Base : puissance fiscale 4 CV au lieu de 5, sièges AV à dossier rehaussé avec guide appui-tête. TL : moteur 4 CV, 1 108 cm3, 45 ch DIN, sièges AV à dossier rehaussé avec guide appui-tête. Automatic : puissance fiscale 6 CV au lieu de 7. GTL : moteur 4 CV identique TL. GTL, Automatic, TS : boucliers et protections latérales teinte anthracite. GTL : montre sur planche de bord, console autoradio revêtue de moquette, sièges AV style “pétale” sans appui-tête. Automatic : montre sur planche de bord, console autoradio revêtue de moquette, sièges AV style “pétale” avec appui-tête.
TS :c onsole autoradio revêtue de moquette, sièges AV style “pétale” avec appui-tête. Alpine : console autoradio revêtue de moquette, sièges AV “pétale” avec appui-tête, mano d’huile et voltmètre à la place du réceptacle à monnaie, dossier AR rabattage par moitié, cache-bagages. Société : sièges AV à dossier rehaussé avec guide appui-tête.
Extérieurement on mesure toute la simplicité du kit Coupe. Sous le capot, ce n’est pas la même histoire.
Non remplacée en 1974, la R12 Gordini n’a pas eu de descendance immédiate. Malgré cette lacune, la Régie Renault n’a pas souhaité se retirer d’un domaine sportif qui lui avait assuré une très impor tante promotion par le passé : les courses monotypes sur circuits. La sortie de la R5 LS a été opportune car elle a permis d’occuper le terrain sportif durant le temps où les bureaux d’études concoctaient la remplaçante de la Gordidouze, une R5 Alpine qui sera fabriquée à Dieppe.
La R5 LS étant une petite voiture économique, la Régie opte pour une Coupe très attractive financièrement. Un véritable premier pas pour les compétiteurs en herbe. Le kit permettant de transformer une R5 LS d’origine – puis la TS dès sa sortie – en modèle adapté aux circuits (vitesse 175 km/h) est à installer soimême. Il se compose des éléments suivants : canule d’échappement Devil, embrayage spécifique, filtre à huile déporté et plaque sandwich, radiateur d’huile, coiffe de carbu pour admission dynamique, plaque d’isolation thermique à l’échappement, jupe avant munie de deux boas de refroidissement des disques de freins, jantes élargies Dunlop (5,5’’ x 13) chaussées de pneus Dunlop Sport Formula en 155/70 SR13,
amortisseurs spécifiques, barres de torsion spéciales, barres stabilisatrices 18,7’’ AV et 21’’ AR, crémaillère de direction directe, arceau de sécurité Devil six points, extincteur Sicli 5 kg, coupe-circuits intérieur et extérieur, volant cuir trois branches d’Alpine A310 et harnais quatre points. Le moteur bénéficie également de pièces spéciales élevant la puissance à 80 ch DIN (soupapes et ressorts, carburateur modifié, couvre-culasse bleu avec bouchon alu vissé, collecteur d’échappement Devil, arbre à cames, bielles, bougies).
En revanche, l’usinage et l’équilibrage sont strictement interdits afin de contenir le coût de la préparation. L’ensemble du kit était vendu 4 500 F HT sans le volant.
R5 Turbo Le Monstre
C’est la version de tous les superlatifs. Hypertrophiée, hyperpuissante, méga-impressionnante, la R5 Turbo est née à la fin des années 70. C’est au Salon de Paris 1978 qu’est dévoilée une maquette à l’échelle 1, réalisée chez Heuliez, du futur modèle. Elle n’est pas motorisée, mais la mécanique est en gestation dans les locaux de Renault Sport à Viry-Châtillon. En compétition, les blocs turbocompressés du losange raflent tout, que ce soit en endurance ou en F1, c’est pourquoi cette solution est retenue pour la future bête de rallye.
Le véhicule définitif, assemblé chez Alpine à Dieppe (comme le seront tous les exemplaires suivants), sera présenté au Salon de Bruxelles 1980. Numérotés de 1 à 1678, les modèles de série seront vendus à compter du mois de mai et jusqu’à l’été 1982. Forte de 160 ch, la R5 Turbo dépasse les 200 km/h et bénéficie d’un comportement routier exemplaire avec son moteur en position centrale arrière. Hormis des performances de pointe, l’auto se démarque par un style qui lui est propre particulièrement travaillé dans l’habitacle.
Les sièges, la planche de bord et le volant, signés Marcello Gandini, ne ressemblent à rien d’autre de connu, ce qui procure à la Renault une identité forte. Peinte en rouge ou en bleu, elle se singularise également par son intérieur assorti (bleu sur les autos rouges, rouge sur les bleues). Avant tout destinée à courir en rallyes dans les Groupes 4 et B, cette deux places sera en outre disponible dans plusieurs évolutions spécialement élaborées pour la compétition.
Chacune d’elles proposera un éventail de puissances allant de 185 ch (Cévennes) à 350 ch (Maxi). Très éloigné de la série, le 4 cylindres culbuté se transforme en une incroyable usine à gaz dont seuls les pilotes les plus adroits tireront parti. A l’automne 1982, la R5 Turbo est remplacée par la Turbo 2, une version simplifiée dotée de la même mécanique mais accueillant des ouvrants en acier et un intérieur identique à la TS. Moins exclusif que le précédent, ce modèle restera au catalogue jusqu’en 1986. Il sera produit à 3 183 exemplaires.
MAI 1980
Nouvelle version R5 Turbo (moteur central AR, 6 CV, 1 397 cm3, 160 ch DIN, boîte 5, deux places, sièges, planche de bord, volant et éléments de carrosserie spécifiques).
JUILLET 1980
Tous modèles : poignées extérieures noires, généralisation des balais d’essuie-glaces noirs. Automatic : disponible également en carrosserie cinq portes. GTL : appui-tête de série.
FÉVRIER 1981
Automatic : nouveau moteur 5 CV, 1 397 cm3, 58,5 ch DIN.
JUILLET 1981
Tous modèles : nouveaux monogrammes, commodo unique de commande d’éclairage, clignotants et avertisseur. Base, Société : drap imprimé diagonal remplaçant celui à pois.
OCTOBRE 1981
GTL: nouveau bouclier avec spoiler AV, option boîte 5 (500 F). TS : nouveau moteur 6 CV, 1 397 cm3, 63 ch DIN, boîte 5, bouclier AV idem GTL. TX : nouvelle version sur base TS ou Automatic. Direction assistée, lève-vitres électriques, jantes alliage. Alpine Turbo : remplace l’Alpine (moteur 7 CV, 1 397 cm3, 110 ch DIN, roues alliage de série, quatre disques de freins).
JUILLET 1982
Base, Société : boucliers teinte anthracite au lieu de beige, freins AV à disques, roues ajourées. Commandes chauffage éclairées sur Société 1 100. TL, Automatic : bouclier AV spoiler idem GTL, TS, TX. TS, TX à boîte mécanique : allumage électronique, essuie-glace AR idem Automatic. Alpine Turbo : essuie-glace AR idem Automatic, décoration latérale avec inscription Turbo en remplacement du A5, pré-équipement radio avec antenne, câblage et grilles HP. Apparition de la Campus (moteur 4 CV, 845 cm3, 37 ch DIN, toit ouvrant, rééquipement radio, spoiler AV, roues de style, déco latérale, bouchon antivol, becquet ZR, feux de recul ; teinte unique bordeaux). Nouvelle version Turbo 2 en remplacement de la Turbo. Moteur identique mais présentation simplifiée avec tableau de bord, volant et sellerie idem TS, nuancier élargi.
OCTOBRE 1983
La Super Campus remplace la Campus (Idem Campus sauf moteur 956 cm3, 44 ch DIN, essuie-glace AR, nouvelles teintes jaune Van Gogh et bleu Versailles en plus du bordeaux).
MARS 1984
Apparition de la Lauréate Turbo qui remplace l’Alpine Turbo (équipement simplifié, roues style R12 Gordini avec pneus 175/60/13, décor spécifique, boucliers et calandre de la couleur de la caisse ; teintes blanc, rouge ou gris argent métallisé).
JUILLET 1984
Nouvelle version Lauréate élaborée depuis les modèles L, TL (bouchon antivol) et GTL (sièges “pétale”, montre digitale). Roues style R12 Gordini, décor spécifique, boucliers et calandre de la couleur de la caisse ; teintes sable, blanc, rouge, gris argent métallisé, cendre métallisé.
OCTOBRE 1984
Fin de production suite à la présentation de la nouvelle R5 surnommée “Supercinq”.
1985
Liquidation des stocks de R5 Lauréate, vente de 182 Turbo 2 et 7 “Maxi 5”. Les 143 dernières Turbo 2 seront écoulées en 1986. Production totale (incluant Siete espagnole, Saipa 5 et PK iraniennes) : 5 580 626 exemplaires.
Au moment d’acheterc
Ce dossier vous a convaincu de vous mettre en quête d’une Renault 5 ? Voici quelques points à vérifier, ainsi que les cotes moyennes de chaque version.
CARROSSERIE
La R5 est très sujette à la rouille. Les points critiques concernent l’ancrage des barres de torsion arrière et les longerons. S’ils sont attaqués, les travaux à réaliser seront très importants. Après avoir inspecté ces deux endroits, focalisez-vous sur le fond de coffre, les planchers, les ailes arrière (la boue s’agglomère dans les passages et l’eau s’y évacue mal), le bas des ailes avant et des portes, les pieds de portes, l’entourage des phares et la baie de pare-brise. Examinez également les pare-chocs, surtout les gris des premiers modèles, car il devient compliqué d’en trouver en bon état.
MOTEUR/BOÎTE
Très fiables quelle que soit la version. La faiblesse majeure concerne la rotule de tringlerie de boîte. Fragile, celle-ci peut vous lâcher à tout moment et vous perdez d’un coup deux rapports. A noter que les synchros de boîte, surtout celui de deuxième, ont tendance à s’user rapidement.
INTÉRIEUR
La finition est légère. On le mesure souvent à l’affaissement des sièges, l’usure des tissus et la mauvaise tenue des éléments de tableau de bord. Autre souci classique : le décollement de la garniture de pavillon. Peu de problèmes électriques.
COTATION
L (1972-1979) : 4 500 euros. L (1979-1984) : 1 000 euros. TL (1972-1979) : 5 000 euros. TL (19791984) : 1 000 euros. GTL (1976-1979) : 3 000 euros. GTL (1979-1984) : 1 500 euros. LS : 8 000 euros. TS (19751979) : 6 000 euros. TS (1979-1984) : 4 000 euros. Société (1975-1979) : 2 000 euros. Société (19791985) : 1 500 euros. Automatic (1978-1981) : 1 800 euros. Automatic (1981-1984) : 1 800 euros. TX : 5 000 euros. Campus : 2 000 euros. Super Campus : 2 500 euros. Lauréate TL/GTL : 2 000 euros. MonteCarlo : 7 000 euros. Le Car : 6 000 euros. Alpine : 13 000 euros. Alpine Turbo : 10 000 euros. Turbo : 85 000 euros. Turbo 2 : 60 000 euros.