La GT hybride rechargeable s’ofre une carrosserie roadster et quelques chevaux supplémentaires. Presque quatre ans après notre première rencontre, c’est un peu tard pour le coup de foudre. Mais peut-être pas pour le grand amour…Par Romain Vannier Photos Adrien Cortesi
DE L’ELECTRICITE DANS L’AIR
2019 BMW i8 Roadster
Les plus belles histoires naissent parfois d’une rencontre sous tension. Partager les routes étroites et vallonnées de l’île de Majorque, au volant d’une voiture de près de 2 mètres de large, avec plus de dix-sept cyclistes au mètre carré, c’est a priori un bel exercice de diplomatie. Nos dépassements répétés (et pas toujours académiques) en BMW i8 au sein d’un peloton perpétuel n’auront pourtant été salués que par des signes d’approbation.
A moins que nous n’ayons pas précisément saisi la signiication de ces doigts levés vers le ciel… Toujours est-il que nous aurons spontanément noué un dialogue cordial, voire amical, avec une bonne poignée de idèles de la petite reine lors de cet essai. Rouler en découvrable favorise nettement l’échange. Cette inédite version roadster de l’hybride bavaroise, née en 2014, permet d’en faire une nouvelle fois la démonstration.
Pour s’en convaincre, il sufit d’une petite quinzaine de secondes, soit le temps nécessaire à la disparition de la capote en toile. D’une simple pression continue sur l’interrupteur idoine, la manœuvre s’effectue de surcroît jusqu’à 50 km/h ain de poursuivre l’ascension d’un col sans perdre le contact avec les meilleurs grimpeurs.
Circuler à la seule force du moteur électrique reste également un bon moyen d’attiser la curiosité de nos compagnons de route. Le décalage créé dans ce cas entre l’agressivité de la ligne, intacte, et la discrétion de la mécanique fait toujours autant recette.
Supplément d’autonomie relatif
Parler de réel silence serait toutefois mensonger. Assurant par défaut les premiers tours de roues, l’électromoteur, en prise avec le train avant (voir encadré), émet un siflement clairement perceptible. Et pas seulement dans le but d’avertir piétons et lâneurs à vélo qu’un véhicule approche. Renseignements pris auprès de ses clients, BMW s’est aperçu que ce chuintement, tirant vers les aigus à mesure que la vitesse augmente, faisait partie intégrante de la personnalité si singulière de l’i8. Dont acte.
« Remasterisée » et ampliiée par la hi-i sans virer au grotesque, la bande son évoque une soucoupe volante au décollage. A supposer que quiconque ait assisté à l’élévation de ce type d’aéronef pour en reproduire la sonorité… Si manier l’une des portières en élytre avant de « descendre » au sein d’un cockpit aux accents futuristes n’avait pas sufi au dépaysement, cette acoustique science-ictive le garantit déinitivement.
Jusqu’à présent limitée à 37 km, l’expérience peut en prime se prolonger sur 53 km oficiellement (voire 55 km en Coupé) après une recharge complète des 11,6 kWh de la nouvelle batterie lithium-ion. Dans la vraie vie, nous en aurons parcouru un peu plus des deux-tiers avant d’être « à sec ». Mais la gestion de la chaîne hybride laisse peu l’occasion de proiter de ce supplément d’autonomie.
Le 3 cylindres turbo, toujours implanté sur le train arrière et d’une puissance inchangée de 231 ch, a le sommeil léger. A moins de forcer le mode « zéro émission », l’alterno-démarreur n’attend pas que l’accélérateur se retrouve au tapis pour réveiller le bloc thermique. Bien que relevée de 12 ch pour atteindre un total de 143 ch, la puissance électrique sufit rarement à honorer les exigences du conducteur en matière d’accélération.
La mise en route est même immédiate à l’engagement du mode Sport via le sélecteur de la boîte automatique. Emerge soudainement l’aboiement du petit 1 499 cm3, suivi d’un ronlement bien plus charismatique que sa cylindrée ne le laisse imaginer. Là encore, la sono joue un rôle d’ampliicateur. Assurant le spectacle, ce moteur de Mini ne fait pourtant qu’accompagner la poussée initiée par son homologue sous tension. Du moins tant que le rythme n’excède pas celui de la balade. La transmission à 6 rapports, dotée d’un conventionnel convertisseur, se charge de distribuer l’énergie thermique aux roues arrière sans altérer la luidité de fonctionnement.
Cette harmonie perdure même en écrasant la pédale des gaz. Sauf que les deux moteurs joignent alors, sans aucun temps de réponse, leurs 374 ch cumulés pour entretenir une accélération aussi linéaire que surprenante. Oubliez la poigne de la concurrence traditionnelle à moteur V8 et moult turbos. Malgré un 0 à 100 km/h annoncé en 4”6 (contre 4”4 désormais pour le Coupé), la poussée n’a rien de physique.
Mais à prendre la route en pleine igure par l’immense baie de pare-brise, dans une position semi-allongée, les fesses au ras du sol, tout en se faisant rudoyer les tympans par un « trois pattes » vrombissant au point de faire croire qu’il en compte le double, le taux d’adrénaline grimpe en lèche. D’autant qu’à cette somme de sensations, il faut ajouter l’effet multiplicateur de la conduite au grand air.
A la diférence d’une Lexus LC 500h, la BMW i8 est une hybride qui se recharge. Sa batterie lithium-ion de 11,6 kWh lui permet ainsi de parcourir jusqu’à 53 km en silence… ou presque.
UNETECHNOLOGIE À DEUX VITESSES
Intégrée au tunnel central du châssis, la batterie lithium-ion est désormais capable de délivrer 34 Ah (contre 20 auparavant) et permet d’obtenir plus de puissance de la part du moteur électrique. Cette machine, entraînant les roues avant, reste néanmoins associée à une boîte à deux vitesses pour contenir son régime de rotation.
Le premier rapport n’est utilisé que lorsque le mode 100 % électrique est sélectionné et limite du même coup la vitesse maxi à 120 km/h. Le second se réserve à l’inverse au mode hybride et permet à l’essieu avant d’être entraîné quelle que soit la vitesse de la voiture, jusqu’à 250 km/h.
TECHNIQUE
Moteur : 3 cyl. turbo central + élec. synchrone AV
Cylindrée : 1 499 cm3
Puissance maxi : 374 ch (cumulée) ; 231 ch à
5 800 tr/mn (thermique) + 143 ch à 4 300 tr/mn
(électrique)
Couple maxi : 32,6 mkg à 3 700 tr/mn (thermique)
+ 25,5 mkg à 0 tr/mn (électrique)
Régime maxi : 6 500 tr/mn
Transmission : aux 4 roues, auto 6+2 vitesses
Contrôle de stabilité/autobloquant : de série/non
Poids annoncé : 1 670 kg
Rapport poids/puissance : 4,5 kg/ch
L – l – h : 4 689 – 1 942 – 1 291 mm
Empattement : 2 800 mm
Voies AV/AR : 1 644/1 721 mm
Pneus AV/AR : 195/50 R 20 & 215/45 R 20
Carburant : 42 l Capacité batterie : 11,6 kWh
Prix de base : 156 950 €
PERFORMANCES ANNONCÉES
V. max : 250 km/h (limitée électroniquement)
0 à 100 km/h : 4”6
L’ablation du toit n’a guère de conséquence sur la ligne, toujours aussi spectaculaire. BMW est même parvenu à reconduire les magnifiques portes en élytre du coupé.
Grand tourisme
Les remous restent cependant d’une agréable discrétion à bord. Grâce notamment à une troisième vitre électrique située au creux du bossage du couvre-capote, la gestion des turbulences apparaît en phase avec la vocation grand tourisme de l’i8. Car en dépit de sa complexité mécanique, de ses performances en hausse et de sa structure en plastique renforcée de carbone, cette Béhème n’est toujours pas une véritable sportive. Non pas qu’un quelconque manque de ressenti soit en cause.
La suspension pilotée à la plage de fonctionnement élargie (plus souple en Confort, plus ferme en Sport) s’arrime à une coque qui n’a quasiment rien perdu de sa rigidité alors que l’embonpoint du roadster est annoncé à seulement 60 kg. L’impression de faire corps avec la machine ne s’est pas envolée avec le toit. Un peu plus consistante suite à la révision de l’assistance électrique, la direction permet même de mieux cerner les limites du train avant.
Hélas, celles-ci restent le principal talon d’Achille de cette drôle d’intégrale. L’essieu directeur à triangles superposés init toujours par élargir la trajectoire en premier. Sans les comparer à des roues de vélos, la paire de jantes avant montées de Bridgestone Potenza S001 en 195/50 R 20 pénalisent la vitesse d’entrée en courbe. Nous n’irons pas jusqu’à taxer l’i8 de lémarde à l’inscription. Mais le raidissement de la barre anti-roulis arrière (+ 20 %) n’a pas les effets escomptés sur l’équilibre général.
Ce tempérament neutre s’assortit davantage à une conduite coulée qu’à la précipitation. Ça tombe bien, la consistance naturelle de la pédale de frein garantit des décélérations progressives. La polyvalence de cette GT régresse tout juste par la disparition des places arrière d’appoint à bord de cette version découvrable. Mais c’est bien négligeable face au supplément d’exclusivité qu’inspire ce roadster aux saveurs uniques. Sans compter le capital sympathie auprès de nos amis cyclistes.
L’AVIS DE ROMAIN VANNIER
Cette variante Roadster de l’i8 est aussi la meilleure des deux désormais proposées. D’une orientation plus grand tourisme qu’un simple coupé, cette configuration sied parfaitement à cette BMW. S’il faut définitivement faire le deuil d’une sportivité exacerbée,
sa sophistication n’éclipse pas les sensations. Si en plus, cela permet de faire un (petit) geste pour la planète…
“Qui a dit qu’il fallait faire une croix sur les sensations de conduite au volant d’une hybride ? Celles procurées par l’i8 Roadster sont assez uniques.”